La France est souvent critiquée pour la lourdeur et la complexité de son droit social. S’il y a nécessairement un peu de vrai, il faut aussi en reconnaître les nombreux avantages.
Car oui, notre droit social reste l’un des plus protecteurs du monde. Et au-delà de la protection, il offre aux entreprises de vrais outils de management et des leviers de pilotage efficaces, qui sont accessibles sans logiciels compliqués.
C’est précisément le cas des entretiens annuels et des entretiens professionnels. Vus par certains comme une obligation, ils revêtent surtout de nombreuses vertus, qui gagnent à être connues. Et comme c’est notre rôle de vous aider à voir le positif, alors on s’y colle… non sans plaisir 😊
Bonne lecture,
1. Rappels et définitions
Nous arrivons à la saison des entretiens. On parle de « saison », puisqu’ils sont souvent réalisés au même moment, pour tous les salariés. Un moment rituel s’il en est, qui nécessite un peu de préparation et d’organisation en amont. Mais ces entretiens peuvent aussi avoir lieu au cas par cas, par exemple à la date anniversaire de l’entrée du collaborateur dans l’entreprise.
Il faut distinguer l’entretien professionnel de l’entretien annuel :
- L’entretien professionnel revêt un caractère obligatoire pour l’employeur. « Il a pour objectif de définir les possibilités d'évolution du salarié et les formations qu'il serait judicieux de mettre en place pour accompagner le salarié dans le déroulement de sa carrière. Cet entretien ne porte pas sur l'évaluation de son travail, mais bien sur son évolution professionnelle »[1]. Il doit avoir lieu tous les deux ans, ainsi qu’au retour de certains congés ;
- L’entretien annuel reste quant à lui facultatif. Il est néanmoins recommandé, tant il a fait ses preuves comme outil de management et de suivi des collaborateurs. Son objectif est « d'évaluer les compétences des salariés et ainsi d’identifier les points forts et ceux à améliorer. Il permet également, à l'employeur et au salarié, de déterminer les objectifs de l'année à venir. Cet entretien n’est pas une obligation, sauf s’il est prévu par accord collectif ou convention collective »[2].
2. Cadre réglementaire
2.1 Les dispositions
L’entretien professionnel est encadré par la loi n°2014-288 du 5 mars 2014, reprise à l’article L.6315-1 du Code du travail. Une loi qui portait réforme de la formation professionnelle, et qui a défini et rendu l’exercice obligatoire.
Par ailleurs, la "loi Travail" de 2016 a créé une obligation pour l’employeur d’informer son salarié sur la VAE (validation des acquis de l’expérience) lors cette rencontre.
Enfin la loi impose que sur une période de 6 ans, chaque collaborateur ait bénéficié d'au moins 2 des mesures suivantes :
- Au minimum une action de formation ;
- L’acquisition d'un élément de certification professionnelle (diplôme ou autre certificat) validant une formation, ou une VAE ;
- Une progression salariale, la réglementation ne précisant pas de quel ordre.
A défaut, l’entreprise s’exposerait à des sanctions.
2.2 Les sanctions
Elles diffèrent selon la taille de l’entreprise :
- < 50 salariés : soumise à ses obligations en matière de formation, l’entreprise doit garantir au collaborateur une adaptation à son poste de travail ainsi que le maintien de son employabilité. En cas de non-respect de ces obligations et de contentieux à ce sujet, elle pourrait se voir infliger le paiement de dommages-intérêts au salarié lésé ;
- > 50 salariés : l’entreprise qui n’aurait pas mis en place, lors des 6 dernières années, les entretiens professionnels ainsi qu’au moins une action de formation non obligatoire pour un salarié, se verrait dans l’obligation d’abonder son compte personnel de formation (CPF) à hauteur de 3 000 €.
Après avoir abordé les aspects techniques de ces entretiens, voyons-en la portée managériale. Car on peut voir en eux des outils de pilotage bienvenus pour l’entreprise.
Vous ne voulez pas vous embêter à déchiffrer la réglementation ? Nous le faisons pour vous.
3. Un exercice vertueux, d’une portée incontestable
Guerre des talents, attrition des profils, grande démission, quiet quitting… On ne peut pas dire que la sphère RH manque de phénomènes anxiogènes ! Mais ne cédons pas à la sinistrose : certains y verront aussi un signe de saine émulation.
Car tout ceci amène les entreprises à revisiter leur Employee Value Proposition, avec en ligne de mire leur démarche QVCT. Soit elles s’équipent, font appel à des cohortes de consultants pour mettre en place des programmes de changement sophistiqués. Ou alors elles font avec ce que la loi ou le bon sens mettent à leur disposition.
Or les entretiens annuels et professionnels sont vertueux pour les parties prenantes. Ils alimentent, certes dans un formalisme marqué, un dialogue supposé franc et constructif. Celui-ci révélera des points durs, confrontera des malentendus, mais il mettra également au goût du jour des points de satisfaction et préparera, qui sait, de vraies pistes de changement !
Voyons à présent les nombreux avantages de ces dispositifs :
- Motivation des salariés :
Les entretiens aident à identifier des signaux faibles tant individuels que collectifs, permettant de prendre des mesures correctives, et de faire des propositions soutenant l’engagement. Ils révèlent les domaines préférentiels d’investissement des salariés (mais aussi bien leurs ”irritants”), et ils aident à imaginer quels sujets leur permettraient d’entretenir la flamme ;
- (Re)mobilisation des salariés :
En mettant de la franchise et des mots sur des éléments d’insatisfaction ou de lassitude, les entretiens annuels et professionnels sont un levier de prévention du risque de bore out, et plus globalement de quiet quitting. Ils permettent en outre de déceler le "potentiel d’ambassadorat" de certains éléments, certes souvent les meilleurs et déjà les plus investis. On peut alors recueillir leur témoignage pour servir la marque employeur, dans un programme d’employee advocacy ;
- Accompagnement de la croissance :
Les entretiens offrent une vision claire sur l’état des compétences disponibles, et celles qui manquent pour soutenir la stratégie de l’entreprise. Ils sont le socle sur lequel les stratèges RH bâtissent et réévaluent leur GEPP (Gestion des Emplois et Parcours Professionnels, remplaçant la GPEC), réalisent des arbitrages, et imaginent leurs investissements ;
- Fidélisation des salariés :
En lien avec le point précédent, la matière récoltée lors des entretiens permet d’inscrire chaque collaborateur dans une trajectoire d’apprentissage et de développement de son employabilité. On élabore ainsi le plan de formation et la politique de rémunération / revalorisation à appliquer à chacun.e. De quoi anticiper au plus tôt les risques de départ, un autre sujet sur lequel nous apportions un éclairage le mois dernier.
Ne partez pas en aveugle et faites aussi le point sur les bénéfices concrets que vous procurerait la mise en place des entretiens. Consultez-nous pour élaborer une stratégie gagnante.
4. Zoom sur l’entretien professionnel et sa mise en oeuvre
L’entretien professionnel se prépare et engage votre image d’employeur. Amaïa RH peut justement vous aider à concevoir et déployer le dispositif, qui correspondra à vos objectifs et vos contraintes.
Mais en attendant d’en échanger de vive voix 😊, nous vous présentons un peu le process[3] :
1. Vérifiez l’éligibilité de votre salarié
La loi du 5 mars 2014 vise tous les salariés disposant d’au moins 2 ans d’ancienneté dans l’entreprise, quel que soit leur contrat de travail. Il faut néanmoins exclure les salariés mis à disposition des entreprises d’accueil, ceux intervenant dans le cadre d’une sous-traitance ainsi que les intérimaires[4].
2. Préparez votre entretien
Il peut être l’occasion de nombreuses questions, y compris de la part du salarié. Alors pour le préparer le mieux possible, nous vous conseillons de consulter une liste de questions-réponses publiée par le Ministère du travail, du Plein Emploi et de l’Insertion.
3. Convoquez votre salarié
Vous avez l’obligation de convoquer le salarié à cet entretien. Si la loi ne prévoit pas de formalisme particulier, la convocation doit indiquer les objectifs de l’entretien ainsi que les conditions de sa tenue.
A ce propos, l’existence et les modalités pratiques de l’entretien peuvent faire l’objet d’une note, d’une réunion d’information ou bien être diffusées par l’intermédiaire des représentants du personnel, le cas échéant.
4. Réalisez l’entretien professionnel
En outil de management stratégique de vos RH, il procure une visibilité sur les compétences professionnelles à votre disposition à l’instant T. Mais il vous permet également de fidéliser et de faire évoluer vos collaborateurs, en les valorisant et en les motivant par de véritables perspectives de carrière (qualification, emploi).
5. Formalisez-en la synthèse
Une fois l’entretien terminé, il doit donner lieu à un compte-rendu, établi en 2 exemplaires signés par l’employeur et le salarié et, au besoin par les personnes les ayant assistés avec mention de leur qualité.
Un exemplaire est transmis au salarié, ou alors sa copie est remise en main propre contre décharge.
[1] Source : juritravail.com [2] Idem [3] D’après : https://www.lumio-rh.fr/developpement-evaluation/mettre-en-place-entretien-professionnel.html#etape2 [4] https://travail-emploi.gouv.fr/formation-professionnelle/entreprise-et-formation/entretien-professionnel#Quels-sont-les-salaries-qui-beneficient-d-un-entretien-professionnel-nbsp
Nous souhaitons que cet article vous ait interpellé.e.s sur la nécessité de faire de ces entretiens de vrais leviers de management et de pilotage RH.
L’évolution professionnelle est une co-construction intelligente entre le collaborateur et son entreprise. A notre sens, l’entretien professionnel et l’entretien annuel en sont deux parfaites illustrations qu’il ne coûte pas cher de mettre en œuvre et de valoriser !
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Nous vous répondrons toujours avec le sourire !
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